Présentation

Les livres ont cette merveilleuse particularité de remonter le moral, d'effacer pour un court instant les soucis du quotidien. Certains renferment des connaissances plus ou moins concrètes ; d'autres sont romancés et poétiques, aident à s'évader vers un ailleurs mystérieux, entraînant l'imagination du lecteur dans un voyage fantastique. D'étrangers lorsqu'ils entrent dans la bibliothèque, ils deviennent parfois des compagnons, des amis, voir des confidents. Le plaisir de feuilleter un livre usé rend nostalgique, évoque le temps qui passe.

Des écrivains ont jadis couchés sur le papier des mots pour faire des phrases, donner du sens à leur foisonnement intérieur ou rendre accessible à une petite société d'initiés des connaissances scientifiques des plus ardues. Dans ma bibliothèque, il est possible de passer de la science-fiction à l'humour, de l'astronomie au théâtre des temps modernes, en passant par la philosophie et l'histoire, tout en rencontrant au passage quelques-uns des « grands classiques » de la littérature française.

samedi 7 décembre 2013

Histoire et roman : une relation conflictuelle.

Les historiens n'aiment pas le roman historique, surtout lorsqu'il est écrit par un pair. Un Christian Jacq est très souvent critiqué pour ses ouvrages. C'est un égyptologue professionnel pourtant. Il possède le titre universitaire qui lui confère une légitimité dans son domaine. Comment pourrait-il écrire de tels romans sans un minimum de connaissances ? Son érudition ne fait pas de doute. Certains détails montrent qu'il s'agit de quelqu'un qui maîtrise son sujet. Dans son Imhotep, l'inventeur de l'éternité il mentionne que Khâsekhemoui est enterré dans une chambre funéraire en brique. L'utilisation des blocs de pierre est en effet une "invention" d'Imhotep. Pour savoir cela, il faut avoir été chercher l'information que ce soit dans un ouvrage général ou sur un site Internet spécialisé comme antikforever.com
L'écriture de l'histoire universitaire doit-elle être formatée, neutre, sans profondeur ? Il me semble que non. Comme étudiant en histoire je dois respecter certaines règles. Pour commencer, ne pas utiliser le "je", mais le "nous" ou le "on". C'est très prétentieux. La première personne du singulier est une manière d'assumer ce que l'on écrit. La première du pluriel englobe indirectement l'institution. Le récit doit être une transmission de connaissances, mais presque n'importe qui pourrait signer le texte. Ce qui fait l'originalité d'un mémoire ou d'une thèse c'est le sujet abordé, la rigueur avec laquelle il est traité, les recherches effectuées. Finalement, plus un travail universitaire est original et l'historien sérieux dans sa manière de procéder, plus il sera reconnu par ses pairs et par l'institution.
La vulgarisation, même en restant dans un cadre académique, passe déjà mal, même avec des notes de bas de page et une bibliographie à la fin. Lorsque la vulgarisation se transforme en roman, sans appareil critique, cela vire à l’infamie. Il y a bien sûr des dérives, comme dans certains livres de Max Gallo. Dans son Roman des rois il a une approche très personnelle de la persécution des juifs par Louis IX (1226-1270). Il ne dénonce pas clairement la politique du roi. C'est pour le coup une prise de position politique, très contemporaine, et dommageable sur un plan scientifique.
Si le roman historique peut permettre une plus grande liberté de style, avec l'invention de personnages de fiction, il est nécessaire (de mon point de vue) que l'auteur possède une certaine maîtrise de son sujet, comme c'est le cas de Christian Jacq. Un bon roman historique est pour moi un récit qui parvient à pointer une particularité de l'époque ou de la civilisation abordée. Jacq insiste, pour exemple, sur le côté spirituel et charismatique des rois, en intégrant un peu de magie. Imhotep, dans son roman, possède un don de guérisseur et une facilité dans son travail. Cela ne contrefait nullement la réalité historique. Imhotep était un haut fonctionnaire, un artisan, et il exerçait bien la fonction de médecin. 
Il y a peu, des historiens avaient une plume. Je pense à Georges Duby ou Fernand Braudel. Il serait certainement possible d'en trouver d'autres. Aujourd'hui, c'est plus rare. Lire un livre d'histoire (très universitaire) comme un roman est une exception. C'est même tellement rare que ce type d'ouvrage sont des petites pépites. J'adore les historiens du XIXe siècle car ils ne concevaient pas encore leur discipline comme une science, mais comme un genre littéraire. Dans la manière d'écrire, cela change tout. 
Est-ce vraiment incompatible ? Ne pourrait-on pas écrire un livre d'histoire comme un roman (au niveau du style) tout en gardant un haut niveau de connaissances ? Je suis persuadé que c'est possible. Il n'est pas obligatoire d'écrire un roman historique, avec des dialogues, des personnages fictifs, mais il est important de romancer, d'utiliser des mots simples. Rendre accessible au grand public des recherches pointues est important pour la survie de la discipline. La cosmologie a bien compris cela. Hubert Reeves est un vrai conteur, tout comme Stephen Hawking. Ils nous transmettent des théories très complexes avec des mots simples et sans prendre les lecteurs pour des ignorants stupides. C'est un tour de force qu'il faut souligner.
Les sciences humaines devraient en prendre de la graine, imiter cette volonté de transmission. Le débat sur la légitimité du genre de la biographie historique est illustratif de la fermeture des historiens à des genres considérés comme vulgaires, secondaires. Le livre récent de Patrice Gueniffey sur Bonaparte (1769-1802) est une somme d'érudition. Cela reste une biographie universitaire, mais elle est écrite de manière plus romancée que les autres ouvrages de l'auteur. Elle reste plus accessible aux amateurs du personnage qu'une histoire érudite du Consulat et de l'Empire, par exemple. 
D'ailleurs, qu'est-ce que le grand public ? Personnellement, je commence à avoir des difficultés pour évaluer si un ouvrage est accessible ou non à un pur néophyte. Mon niveau d'étude en histoire (pour l'instant une licence) me permet de comprendre des ouvrages très compliqués (sans forcément les apprécier). Un livre d'histoire qui me raconte une histoire, justement, comme certains ouvrages de Duby, sont est plus passionnant qu'une somme érudite pleine de statistiques et d'hypothèses dépassées. C'est un peu caricatural sans doute. Ce n'est pourtant pas un hasard si les historiens médiatiques sont ceux qui possèdent pour la plupart une plume, un véritable style.
Pour finir simplement, je dirais qu'un livre de vulgarisation est parfois trompeur. Son contenu peut sembler simpliste, déconcertant. La capacité de l'auteur à faire comprendre son sujet est un art. Vulgariser nécessite une énorme maîtrise de son sujet. Expliquer quelque chose que l'on ne comprend pas soi-même est presque impossible et l'échec est garanti. Donc, la relation entre histoire et roman est conflictuelle, par la force des choses, et surtout parce que les universitaires ont décidés qu'un romancier, s'il est en plus inconnu au bataillon, ne mérite aucune reconnaissance légitime (même si son travail est par ailleurs des plus sérieux). 
Une petite anecdote pour la fin. Dans ses lettres, Tolkien explique que ses collègues lui reprochent d'écrire de la littérature de bas étage en se compromettant autant dans de la fiction. Cela n'enlève rien à la valeur des travaux universitaires de l'auteur du Seigneur des Anneaux, même s'il avait le soucis de faire comprendre son propos à ses lecteurs (qu'il s'agisse de ses collègues, d'étudiants ou du grand public lors de certaines conférences). Être à la fois romancier et scientifique, si les deux activités sont clairement identifiées, je ne vois où est le problème. Un Lorant Deutsch n'est pas un vulgarisateur ou romancier car il ne dit pas aux lecteurs que son propos est une interprétation personnelle, un "essai" et non de l'histoire. Il instrumentalise l'histoire à des fins politiques ou idéologiques, et cela c'est grave et ça doit être dénoncé.

Astérix chez les Pictes de Didier Conrad et Jean-Yves Ferri (2013)



Résumé

Le Village d’Astérix enneigé se remet doucement d’un hiver glacial comme jamais, quand Astérix et Obélix font la plus étonnante des découvertes : un jeune homme enfermé dans un glaçon, échoué sur la plage ! Panoramix est formel : il s’agit d’un Picte. Mais qui sont les Pictes ? Des peuples de l’ancienne Ecosse, redoutables guerriers aux multiples clans, dont le nom, donné par les Romains, signifie littéralement « les hommes peints ». Astérix chez les Pictes, c’est donc un voyage épique, en compagnie de Mac Oloch et de la belle Camomilla, vers une contrée riche de traditions. Au fil des pages, on découvre un peuple attachant dont les différences culturelles se traduisent en gags et jeux de mots mémorables. De l’eau de malt, des noms en Mac, des lancers de tronc, des bardes adeptes de la cornemuse, les origines du mur d’Hadrien et du monstre du Loch Ness sont dévoilés ! Et même des Gaulois en kilts, par Toutatis !

Mon avis

Les aventures d'Astérix et Obélix chez les Pictes laissent le lecteur sur sa faim. C'est cependant un bon début pour les nouveaux auteurs. Pas d'extraterrestres, pas de scénario bizarroïde. C'est un classique du genre, en fait. Un album qui se range avec la série d'Astérix chez les Belges, chez les Helvètes, chez les Bretons. Bref, cette présente histoire est une réussite. Je reste réservé car il faut attendre la suite pour être sûr que la série parte sur des bons rails. Le succès d'Astérix chez les Pictes sera sans doute moins important que les albums parus du vivant de Goscinny, mais le bouche à oreille va relever le niveau des ventes. Pour ma part, j'en conseil la lecture car c'est sympathique, avec un humour digne de la série, des jeux de mots tirés par les cheveux mais toujours plaisant. Bref, une petite surprise dans les parutions de la rentrée. 

Note

15/20

Pour justifier cette note en demi teinte, je dirais simplement que j'attends de voir le prochain épisode pour me faire une idée plus précise de ce que la suite de la série nous réserve.